"J'ai rencontré le Seigneur !"

01-07_Taize1.png"Qui suis-je pour dire cela ? Il m'a fallu du temps pour en parler, après de nombreuses hésitations et doutes. Laissez-moi vous raconter ce qui fut pour moi un moment unique.

 

Du 28 décembre au 2 janvier dernier, j'ai participé pour la première fois aux 35e rencontres européennes de Taizé à Rome. Je ne connaissais pas cette communauté, fondée par frère Roger, mais j'avais écouté les très beaux chants méditatifs qui ponctuent les prières de Taizé et aident à s'ouvrir à la beauté d'une communion en Dieu.

Ce 27 décembre, je suis donc parti vers l'inconnu, vers un réveillon du jour de l'An peu ordinaire, vers ce "pèlerinage de confiance sur la terre" sur le thème "Vers une nouvelle solidarité", mais aussi vers Rome, la ville éternelle et vers les tombeaux des apôtres de saint Pierre et saint Paul.

Je ne peux pas vous raconter dans le détail tout ce que nous avons vécu sur place : l'accueil en paroisse, les sites et monuments visités, les prières communes vécues avec les 40 000 jeunes venants de toute l'Europe, les rencontres et les échanges... Ce serait trop long ! Néanmoins, je voudrais vous faire partager ce que j'ai vécu de plus intense dans ce pèlerinage, qui pourrait bien paraître anodin pour beaucoup d'entre-vous mais qui pour moi a pris une place prépondérante dans ma vie de Chrétien.

 

C'était le 31 décembre ! Chaque jour, les 40 000 jeunes qui participaient à ces rencontres européennes étaient invités à se réunir au "Circo Massimo", le plus vaste et ancien hippodrome de Rome, pour la distribution des repas du jour. Nous venions de recevoir notre pique-nique et nous nous installâmes dans cet immense cirque qui se remplissait à vue d'oeil de milliers et de milliers de jeunes. Assis là avec mes compagnes cantalienne de pèlerinage, fatigués par les marches de la matinée, nous reprenions des forces pour continuer le programme de la journée.

01-07_Taize2.pngEt curieusement au milieu de ces 40 000 jeunes, mon regard se pose sur une "vieille femme, toute ridée", vêtue de noir, une mantille usagée sur la tête, assise toute seule, elle dévorait son repas. Mais que faisait-elle là ? Sans doute les organisateurs l'avaient laissé passer et lui avait donné un repas. Après tout, ces rencontres étaient placées sous le thème de la solidarité !

Cette foule impressionnante autour de moi, aurait pu me distraire, mais il n'y avait plus que cette femme qui comptait à mes yeux. Pendant qu'elle "engloutissait" son repas, elle paraissait s'adresser à une personne imaginaire, en gesticulant de la main, mais elle n'attirait l'attention de personne. J'étais fasciné par cette femme, par son regard intense. J'avais envie de lui porter deux pommes restées au fonds de mon sac, mais je n'ai pas osé. Pourquoi ? Je ne le sais pas encore... Ce n'est pourtant pas la première fois que je vois des "SDF", que j'essaye d'aider des démunis.

 

Mais il faut repartir pour découvrir Rome et rejoindre en fin de journée une des grandes églises de Rome, où nous avons tous les jours une prière commune. Une bonne façon de terminer notre journée pour reposer notre corps et notre âme ("Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos. Prenez mon joug sur vous et recevez mes instructions, car je suis doux et humble de coeur ; et vous trouverez du repos pour vos âmes. Car mon joug est doux, et mon fardeau léger..." Mt 11, 25-30).

Après la prière, nous rentrions à pied vers notre logement, au milieu de la foule romaine qui se préparait à fêter le Nouvel An. Soudain, mon regard se pose sur la même "vieille femme" de midi, assise là sur un trottoir entrain de mendier, face à un marchand ambulant. Mais ce n'est pas possible, me dis-je, nous sommes à l'opposé du lieu où nous étions à midi ! Pourtant c'est bien elle, je l'ai vite reconnu à ce regard intense et profond. Je continue ma route, alors que mon esprit s'embrouille... et mes pensées s'évadent vers cette femme. Son visage ne me quittera plus, je le revois toujours et mon coeur est encore troublé, au moment où j'écris ces quelques lignes.

 

01-07_Taize3.pngJ'ai beaucoup médité sur cette "rencontre" qui fut le plus bel instant de mon pèlerinage. Et curieusement, le jour de mon retour de Rome, j'apprends le décès d'Augustine, une "vieille femme" du village, qui vivait aussi humblement. Je lui ai souvent apporté mon aide par des petits gestes qui ne me coûtaient pas grand-chose mais qui étaient, pour elle, d'une grandeur inestimable, me disait-elle à chaque fois.

Alors oui, aujourd'hui, je peux affirmer que j'ai rencontré le Seigneur à travers cette "vieille femme" à Rome. Dieu se laisse trouver chez les plus pauvres. L'appel de l'Evangile à nous tourner vraiment vers les pauvres, nous pousse à dépasser un esprit d'assistance ou de paternalisme, et à découvrir tout ce que nous pouvons recevoir d'eux. Ayons le courage de lier amitié avec les plus démunis. Le Christ, ne nous a-t-Il pas dit : "Jai eu faim et vous m'avez donné à manger. J'étais étranger et vous m'avez accueilli."

 

Pour terminer, je voudrais souligner la chance que j'ai eu pendant ce pèlerinage de participer à la prière commune avec le Saint Père. Ce geste prend un sens particulier aujourd'hui alors que nous venons d'apprendre sa renonciation à la charge pontificale. Le long et intense silence qui s'est imposé à nous pendant la prière commune sur la place Saint Pierre, nous a tous invité à tourner notre regard vers l'essentiel : la Croix du Christ.

Ce fut le deuxième moment de bonheur de mon pèlerinage à Rome. 

 

E R

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